Plusieurs groupes terroristes seraient à la manœuvre dans les récentes attaques au Mali et au Burkina Faso, ce qui pose aujourd’hui la question de leur collaboration.
« Les terroristes ont aussi leur G5-Sahel. Ansar Dine, Front du Macina, al-Mourabitoune, AQMI, Ansarul Islam, État islamique dans le Grand Sahara : ça fait un G5 », ironise le chef d’un groupe d’anciens rebelles du nord-est du Mali. Pour ce combattant, depuis la déroute de l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) dans l’est du Mali et de la Katiba Macina (affiliée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, GSIM) au centre, les jihadistes se sont retranchés au Burkina Faso pour se recomposer. Des connexions ont même été établies entre eux.
Ce serait le cas notamment pour la récente attaque de Boulkessi, attribuée par la force conjointe du G5 Sahel aux terroristes burkinabè d’Ansarul Islam. Une version qu’interrogent des sources sécuritaires et politiques au Burkina. « Les combattants d’Ansarul ne sont pas à la hauteur d’une attaque de ce genre, observe un analyste sécuritaire. Mais une collaboration avec le GSIM ou l’EIGS – car nous sommes dans leur zone d’action – est envisageable ».
Partenariats de circonstance
Ce type de partenariat de circonstance ne serait pas une première. Une note des renseignements burkinabè datée du 30 août 2019 explique notamment que l’attaque de Koutougou, dans le nord du Burkina, revendiquée par le GSIM, aurait finalement été menée par des hommes de l’EIGS.
« Il y a une porosité entre les groupes. Ils s’échangent parfois des combattants, travaillent ensemble ou se partagent les tâches », explique une source bien informée au Burkina Faso. « Boulkessi est à la frontière du Burkina Faso. On peut parfaitement imaginer qu’Ansarul Islam fait le travail de renseignement et que les combattants viennent ensuite de groupes plus habitués et formés aux opérations complexes. »
« Les terroristes veulent faire de la région Sahel du Burkina leur nouveau bastion, poursuit l’analyste. Pour l’heure, ils sanctuarisent la zone ensemble, et régleront leurs différends plus tard ».
Un carrefour stratégique
Depuis plusieurs mois en effet, le nord du Burkina fait l’objet d’assauts dont la logique semble se dessiner aux yeux des experts. Les terroristes ont d’abord fait sauter des infrastructures, comme les ponts autour de Djibo et Arbinda, coupant ainsi du reste du monde les deux principales villes de la région. Les attaques à un mois d’intervalle de Koutougou, au Burkina Faso, puis de Boulkessi, au Mali, ont ensuite libéré momentanément l’espace frontalier des forces militaires régulières.
La région du Sahel, au nord du Burkina, est un carrefour stratégique. Située à la frontière avec le Mali et le Niger, elle n’est séparée de la capitale Ouagadougou que de quelques centaines de kilomètres. Et le Burkina constitue aujourd’hui le dernier verrou avant d’atteindre les pays côtiers comme le Togo et le Bénin, voire la Côte d’Ivoire. Un verrou qui apparaît aujourd’hui bien fragile aux yeux des partenaires européens et régionaux.
rfi