Si le Mali est sanctionné par la CEDEAO, c’est le Sénégal qui subit le plus gros des répercutions économiques. Les deux pays entretiennent depuis longtemps des échanges commerciaux serrés et les sanctions contre le Mali génèrent des conséquences pour le Sénégal sur différents pans de l’économie. Face au courroux des transporteurs sénégalais dont les centaines de camions jalonnent le long de la frontière depuis janvier, les autorités sénégalaises auraient-elles levé le pied ? La « disparition » subite de plusieurs camions à Kidira inquiète la CEDEAO.
L’organisation communautaire a demandé des explications au Sénégal, soupçonné de violer l’embargo décrété contre le Mali. Situé à 1000 km de Bamako, le port de Dakar est la principale destination des camions maliens. Ce qui fait du Mali le principal client du port de Dakar, lequel port souffre donc de la fermeture des frontières. Pour arranger les commerçants maliens et renflouer leurs propres caisses, les autorités douanières et maritimes sénégalaises ferment souvent les yeux en laissant passer des camions maliens. La Cédéao, qui veille à son embargo, a fait filmer par drone le poste frontière de Kidira: elle a trouvé, il y a une semaine, 600 camions maliens bloqués à la frontière mais quelques jours plus tard, elle a découvert, courant avril, que 85% des camions n’étaient plus sur place ! Depuis, Dakar est sur le banc des accusés de la Cédéao, selon Mali Tribune.
Les mesures coercitives prises le 9 janvier par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) à l’encontre du Mali pour sanctionner la junte au pouvoir, ont de simpacts immédiats sur les échanges enytre le Sénégal et le Mali. Les sanctions imposent un embargo sur les transactions financières et les échanges commerciaux, à l’exception des hydrocarbures et des denrées de première nécessité comme le riz, le sucre, l’huile ou les produits pharmaceutiques. De fait, en ce qui concerne par exemple, le ciment, le fer, le sel, la viande de mouton (…) Dakar est dépendant de ses échanges commerciaux avec Bamako alors même que l’on assiste à une hausse généralisée des prix alimentaires.
Pour preuve des problèmes actuels, avant l’embargo, 900 camions maliens ou sénégalais quittaient chaque jour le port de Dakar. Aujourd’hui près d’un millier de camions sont bloqués à Kidira, et dans d’autres villes le long du corridor commercial qui relie Dakar à Bamako. « Si l’État sénégalais nous avait donné un délai avant d’appliquer l’embargo, les transporteurs auraient pu gérer la situation et rester au port de Dakar. L’État doit réparer cette injustice », réclame Gora Khouma, secrétaire général de l’Union des transporteurs routiers du Sénégal.
Et qui dit problèmes de transports, dit conséquences en chaînes. Restaurateurs, mécaniciens, vendeurs et vendeuses d’eau ou de fruits et légumes notamment sont aujourd’hui sans revenu.Ce commerce informel qui fait vivre des centaines de personnes est mis en difficulté par la rupture de flux entre les deux pays. « Ces travailleurs invisibles sont surtout des femmes qui se battent pour nourrir leur famille et sont oubliées, sans aucune aide de l’Etat » précise Khadim Bamba Diagne enseignant-chercheur à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.
En effet le trafic entre les deux pays est très largement handicapé alors que le Mali est le premier partenaire commercial du Sénégal.
Si les flux terrestres sont impactés, il en va de même pour les flux maritimes. Au port de Dakar ; la situation est difficile : « c’est une grosse perte pour nous car 70 % du fret malien passe par Dakar, soit 4 millions de tonnes marchandises en transit chaque année, chiffre Mamadou Corsère Sarr, de la Communauté des acteurs portuaires (CAP) du Sénégal. Aujourd’hui, tout est à l’arrêt, nous n’avons plus d’activités vers le Mali à part les denrées de première nécessité. »
Les entrepôts sont remplis à craquer, provoquant une hausse des prix. Les compagnies de fret sont à la recherche d’autres aires de stockage. L’embargo décidé par la CEDEAO, freine le souhait de développement du Sénégal, qui ambitionne de se positionner comme un hub commercial et une porte d’entrée vers l’Afrique de l’Ouest. Aussi, il serait envisageable que les institutions africaines accompagnent les pays touchés par l’embargo comme le Sénégal ou la Côte d’Ivoire. Et ce en créant un « fonds de stabilisation » pour amortir le choc.
AA
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