Au nord-est de la Syrie, le long de la zone occupée par la Turquie, les chrétiens du Khabour n’ont pas vraiment le cœur à fêter Noël. La plupart sont partis de cette zone mais certains restent et tentent de défendre leur territoire.
Avec notre envoyé spécial en Syrie,Noé Pignède
Avant le début de la guerre civile il y a neuf ans, cette région comptait 20 000 Assyriens, une minorité chrétienne d’Orient. Ils ne seraient aujourd’hui plus qu’un millier. La majorité d’entre eux a fui face à l’avancée de Daech, acronyme arabe du groupe État islamique, en 2015. L’invasion turque en octobre 2019 a contraint la plupart des autres à l’exil.
« Je me bats depuis que j’ai 15 ans »
Sur la ligne de front du nord-est syrien se trouve une mosaïque de groupes armés. « Là, il y a des snipers, russes et turcs. Là-bas, c’est le régime de Bachar. Et ici, c’est chez nous, les gardes du Khabour. »
Depuis le mois d’octobre, cette milice chrétienne, soutenue par les Kurdes et l’armée syrienne se bat contre les forces. Pour Nino, 21 ans, défendre cette terre est un devoir. « Nous nous battrons jusqu’au bout contre les Turcs et ses milices, et nous les vaincrons comme nous avons vaincu Daech, déclare-t-il. Mais nous sommes fatigués. Je me bats depuis que j’ai 15 ans. Beaucoup de mes amis sont partis à l’étranger. Nous devons rester nous battre pour nos maisons et pour notre peuple ».
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Le front de Tall Tamer est une zone morte où se succèdent villages fantômes et églises à l’abandon. Dans le village de Om Alkief, dernier hameau avant la zone contrôlée par la Turquie, seules deux familles chrétiennes sur 30 sont restées. Malgré les combats, Touma Moshé refuse de quitter sa maison.
« Pendant des décennies, nous pouvions vivre notre foi ici, se souvient-elle. Normalement, nous aurions dû fêter Noël ! Mais dans le contexte actuel, nous ne pouvons même plus aller à l’église. Depuis la fin de Daech, la vie avait repris. Le village se préparait à fêter la naissance du Christ, mais soudainement, une nouvelle guerre est arrivée avec ces groupes soutenus par la Turquie. L’histoire se répète. Pour moi, il n’y a aucune différence entre ces gens et Daech ».
L’avenir semble plus que jamais incertain pour les chrétiens du Khabbour. Depuis 2012, 90 % d’entre eux ont quitté la région.
rfi