Télécommunications : Les deux armes qu’Orange et Expresso pourraient brandir contre Free

L’arrivée de la marque Free dans le secteur des télécommunications a mis en alerte les opérateurs de téléphonie qui évoluent au Sénégal. 24 heures après le lancement du produit Free à Dakar, Dakaractu s’est penché sur les chamboulements que cette nouvelle marque pourrait entraîner dans le secteur des Télécoms. Expert en transformation digitale, Aboubacar Sadikh Ndiaye dans un entretien téléphonique qu’il a accordé à ladite rédaction, évoque ici comment Orange et Expresso vont réagir face à ce nouveau concurrent.

À l’en croire, ‘’les opérateurs classiques que sont Orange et Expresso vont formuler deux réponses. Il s’agit d’une réponse sur le marché et d’une autre devant l’arbitre des télécommunications. Coté marché, ils vont, sans doute, apporter une nouvelle proposition de valeur avec de nouvelles offres pour séduire le segment client dont le prix est le principal argument pour décider et ainsi espérer garder les niches flottantes et les candidats à la portabilité. Donc, attendons-nous à de nouveaux pack voix/data pour le grand public’’.

L’autre réponse elle est réglementaire, a-t-il indiqué. C’est-à-dire, que les deux sociétés concurrentes vont ‘’essayer de porter l’argument du dumping de la guerre disproportionnée des prix et de la concurrence déloyale devant l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp) pour dénoncer l’offre de Free avec une ligne de défense basée sur la vente à perte’’, par la nouvelle marque.

Cependant, il est connu que Free ne se laissera pas faire. Car, selon M. Ndiaye, cette marque ‘’est habituée dans ce genre de pratique et a la réputation d’être du nombre des casseurs de prix ‘’Disrupteurs de marchés’’, c’est-à-dire ceux qui déboulent sur un marché aux situations établies et le bouleversent avec une proposition de valeur inédite. Cette guerre entre operateurs sera une guerre opérationnelle sur les offres et stratégique sur la réputation ou la E-réputation. Car, ce sera sous l’arbitrage du client connecté sur les réseaux sociaux’’, a-t-il indiqué.

‘’Attendons-nous à de nouveaux pack voix/data pour le grand public’’

Dans l’entretien qu’il a accordé à Dakaractu, l’expert en transformation digitale, d’indiquer qu’après l’entrée de Free dans la course, ‘‘la première chose qu’il faut dire, c’est qu’en terme de marketing, quand une nouvelle marque arrive sur le marché, cela suscite beaucoup d’intérêt et de curiosité. C’est la raison pour laquelle beaucoup de marques procèdent au re-branding, ce qu’on appelle le changement de nom ou de marque. Pour montrer cette impression de ‘’Neuf’’ ou de ‘’Renouveau’’. Cette société a changé la marque Tigo en Free. Les gens ont envie de découvrir ce qu’il y a de nouveau’’.

Témoin de cet engouement suscité par les nouvelles offres de Free, il appelle cependant, les populations à la prudence. ‘’Aujourd’hui, ce qu’on peut constater, c’est que sur le papier, les offres que Free proposent sont compétitives en terme de prix. Par contre, on ne peut pas juger une offre juste par rapport à son prix. Si tu achètes l’offre et qu’elle est moins cher et que derrière, tu n’arrives pas à te connecter correctement parce que le réseau ne suit pas ou que le débit n’est pas bon, cela pose un véritable problème. Donc, on ne pourra les juger que par rapport à l’expérience utilisateur/client et celle-ci avec le temps. Cependant, sur le papier, on peut dire que les offres qui sont annoncées sont extrêmement compétitives par rapport aux autres concurrents qui sont sur le marché. Elle reste à être validé par l’Artp qui peut statuer sur ses packs, en cas de saisine de la concurrence pour voir s’il n’y a pas Dumping’’.

Aboubacar Sadikh Ndiaye dit n’avoir cependant, ‘’aucune réserve par rapport à l’arrivée d’un nouvel ou de nouveaux opérateurs sur le marché. Pour lui, ‘’plus on a d’acteurs sur le marché, plus on a des offres variées. Et plus les gens pourront se décider par rapport à leurs besoins et à leurs bourses. Donc, aujourd’hui, si on avait 1000 offres, c’est vrai que ça serait difficile de choisir celle qui convient mais c’est sûr qu’on aurait alors 1000 possibilités à notre portée. Donc, aujourd’hui, que ce soit Free, Mtn, China Telecom ou un autre qui vient s’installer, le client de la téléphonie ou de l’internet est ouvert à écouter d’autres propositions d’offres qui permettront de pouvoir choisir parmi une large gamme pack voix/data disponibles’’.

‘’Les offres proposées sont compétitives en terme de prix, par contre … ’’

Expert en son domaine, il se veut prudent concernant les offres de produits faites. ‘’Il y a ce qu’on appelle les débits théoriques et les débits réels. Je peux donner un exemple simple. Tu peux avoir la 4G, souscrire à un pass 4G à Dakar avec un débit plus rapide que quelqu’un d’autre qui a le même pass 4G à Kédougou chez le même opérateur. Pour le moment les chiffres actuels montrent que Orange dispose de la meilleure couverture réseau. Reste alors à Free de faire ses preuves’’, indique-t-il.

Pour M. Ndiaye, ‘’aujourd’hui sur l’offre Free, les débits et les prix qui sont proposés semblent, encore une fois, très compétitifs voir meilleurs sur le papier. Je parle de meilleurs en théorie et sur le papier. Car, au-delà du prix, la couverture réseau et le débit peuvent être des éléments déterminants pour évaluer la pertinence d’une offre en téléphonie/internet. Maintenant, c’est au fil du temps et après usage que les gens pourront dire que dans telle zone, ça marche; dans telle zone, ça marche très bien. Et dans telle zone, ça ne marche pas. Mais on ne peut pas en dire plus juste après une journée d’usage alors qu’on est dans la phase de lancement’’.

Et puis, concernant le débit annoncé, lui se veut prudent, à cause de l’effet de pub. ‘’C’est l’opérateur qui parle. D’autres l’ont fait, je peux donner des exemples d’autres marques qui ont annoncé tel débit alors qu’au final les utilisateurs ont fait l’amer constat d’un écart important entre les débits théoriques et pratiques. Cela ne veut pas dire que la marque est fautive. Mais au moment où on teste un débit sur un point spécifique, le débit peut atteindre un certain niveau dans une certaine zone donnée. On va dire par exemple 50 Mo (Mégaoctets) de téléchargement par seconde, mais cela est un débit qui est théorique. Et ce n’est pas un secret, entre un débit théorique qui est vendu et le débit pratique qui est accessible au consommateur, il y a toujours un écart. L’écart peut être dû à plusieurs causes, notamment la couverture réseau, sa dimension et la qualité des infrastructures utilisées etc…’’

En définitive, Aboubacar Sadikh Ndiaye a estimé que de la concurrence dans le secteur des télécoms, les populations en demandent. Et puis, il n’y a pas mieux pour réguler le marché dans une compétition saine où le consommateur sort gagnant’’.