Vers une internationalisation du conflit libyen

La Turquie se prépare à déployer des troupes en Libye, mais plusieurs sources affirment qu’Ankara a déjà acheminé des supplétifs syriens sur le sol libyen, pour y appuyer le gouvernement d’union nationale de Fayez el-Sarraj face à l’offensive du maréchal Haftar, lui aussi soutenu par des acteurs étrangers. Ce qui renforce aussi l’hypothèse d’une déstabilisation forte du pays qui pourrait s’avérer dangereuse pour l’Europe.
L’envoyé spécial de l’ONU pour la Libye, Ghassan Salamé, dénonce depuis des mois les ingérences étrangères dans ce conflit et les violations de l’embargo sur les armes à destination de la Libye. La Turquie se prépare à un déploiement militaire, mais elle a déjà fourni des armes et notamment des drones au gouvernement d’union nationale.

Le Qatar se fait désormais plus discret en Libye, mais il partage les vues de la Turquie dont il est proche. Dans l’autre camp, celui du maréchal Haftar, on trouve l’Égypte voisine de la Libye et surtout les Émirats arabes unis devenus acteurs-clés du conflit selon le chercheur Jalel Harchaoui : « Le plus dynamique, le plus discipliné, le plus rempli d’initiatives, le plus audacieux de tous ces régimes, c’est les Émirats arabes unis. Après avoir pu installer une dictature militaire en juillet 2013 en Égypte, ils ont considéré qu’il fallait s’occuper maintenant d’un pays qui est la Libye. Et donc à partir de 2014, ils ont soutenu ce fameux personnage du maréchal Haftar. À l’heure actuelle, il y a des drones émiratis qui bombardent la zone de Tripoli. »

Les oppositions régionales se retrouvent ainsi sur le terrain libyen, où la Russie achemine par ailleurs des mercenaires dans le camp du maréchal Haftar, montrant comme en Syrie que Moscou est de retour au Moyen-Orient et en Méditerranée.

►L’Europe craint une déstabilisation de la Libye

Une Libye déstabilisée ce sont d’abord des risques bien répertoriés : plus de contrôle des frontières terrestres avec l’Afrique subsaharienne ou maritimes, de quoi encourager un retour à l’immigration clandestine. Autres craintes : la renaissance de cellules terroristes à travers le pays, l’installation de désordre dans des pays voisins comme le Niger, le Tchad, la Tunisie et l’Égypte.

Leur stabilité est importante pour l’Europe. Ce lundi, les présidents français Emmanuel Macron et égyptien Abdel Fattah al-Sissi l’ont d’ailleurs fait savoir via un communiqué. Ils ont évoqué par téléphone « les risques d’une escalade militaire » en Libye.

Les deux chefs d’État ont aussi évoqué les menaces sur les équilibres maritimes en Méditerranée orientale. Le protocole d’accord entre la Libye et la Turquie est à leurs yeux toujours « contraire au droit de la mer ».

Enfin et c’est nouveau, ce que craignent certains observateurs, c’est une contrepartie en termes de défense : que les États qui soutiennent directement des parties libyennes exigent de disposer de bases militaires dans le pays

rfi