Une fois encore, la ville de Masaya, située à trente kilomètres de la capitale, a été la cible, ce jeudi, d’une attaque des forces de l’ordre. Pour éviter de nouvelles violences meurtrières, les évêques nicaraguayens ont alors décidé de se rendre dans cette ville durement frappée par la répression et dont les habitants se sont déclarés en rébellion contre le gouvernement de Daniel Ortega.
Avec notre correspondant dans la région, Patrick John Buffe
Ils étaient des milliers à être descendus dans les rues de Masaya pour accueillir cette délégation de l’Eglise catholique. Durant plusieurs heures, le cardinal Leopoldo Brenes et les évêques de Managua, accompagnés du nonce apostolique, ont parcouru cette ville transformée par ses habitants en camp retranché.
Depuis plusieurs jours déjà, la plupart des rues sont en effet bloquées par des barricades qui visent à empêcher les attaques de la police, des unités anti-émeutes et des bandes armées.
Cette initiative risquée des évêques nicaraguayens visait à empêcher un nouveau massacre. Pour ce faire, les religieux ont négocié avec la police pour qu’elle mette fin à la répression contre les habitants de cette ville qui ont déjà payé un lourd tribut à la violence.
« Aujourd’hui la police du gouvernement d’Ortega a continué à attaquer les manifestants et notre archevêque a fait une démarche humanitaire, un geste de solidarité et de soutien envers la population de Masaya en se rendant à ses côtés », témoigne Alvaro Leiva, secrétaire de l’Association nicaraguayenne pour les droits de l’homme (ANPD).
« Selon les premières informations que nous avons recueillies il y a pour l’instant 26 morts et une centaine de blessés, poursuit Alvaro Leiva. La répression a commencé le 19 juin, après 60 jours de protestation civile et pacifique de la population de Masaya. Ces violences sont le fait de forces paramilitaires mêlées à des groupes de partisans idéologiques du gouvernement, et sont le fait surtout de la police nationale. »
Dialogue interrompu
Ces attaques incessantes, non seulement à Masaya mais aussi dans d’autres villes du pays, mettent en péril la reprise du dialogue nationalentre le gouvernement et l’opposition.
Un dialogue qui, sans les violences de ces derniers jours, aurait déjà pu être renoué à partir de mercredi, lorsque le président Ortega a enfin annoncé qu’il avait invité la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH), l’ONU et l’Union européenne à venir enquêter sur les violations des droits de l’homme commises depuis le début de la crise qui, en un peu plus de deux mois, a déjà fait quelque deux cents morts