Le mouvement de panique qui a gagné lundi les places financières a contaminé la Bourse de New York qui a fini sur une baisse de 7,79% sans précédent depuis décembre 2008, conséquence de l’effondrement des cours du pétrole qui a déstabilisé encore un peu plus des marchés déjà malmenés par les effets sur l’économie de l’épidémie de coronavirus.
L’indice Dow Jones a cédé 2.013,76 points à 23.851,02. Le S&P-500, plus large, a perdu 225,81 points, soit 7,60%, à 2.746,56. Le Nasdaq Composite lâche de son côté 7,29% (624,94 points) à 7.950,68 points.
Il faut remonter au 1er décembre 2008, en pleine crise financière, pour retrouver un recul en pourcentage des trois indices vedette de Wall Street aussi marqué sur une seule séance.
L’ampleur de la chute des principaux indices new-yorkais a conduit en tout début de séance à une suspension des transactions pendant un quart d’heure, les autorités de marché activant les “coupe-circuits” mis en place après la crise financière de 2008-2009; la baisse du Dow Jones avait en effet dépassé 2.000 points dans les premières minutes d’échanges et celle du S&P avait dépassé les 7%.
A la clôture, les dégâts sont manifestes.
Ce lundi noir s’explique largement par la décision de l’Arabie saoudite de baisser ses prix de vente et d’augmenter sa production, conséquence de l’échec des discussions entre l’Opep et la Russie la semaine dernière à Vienne pour tenter de soutenir les cours.
Cette guerre des prix entre Ryad et Moscou a notamment un effet spectaculaire sur les producteurs américains de gaz de schiste, dont la rentabilité dépend du cours du brut.
“La violence du choc pétrolier constitue une nouvelle urgence dans le contexte de la réduction généralisée de l’exposition au risque qui balaie l’ensemble des marchés mondiaux”, élabore dans une note Paul O’Connor, responsable multi-actifs chez Janus Henderson.
“En un peu plus de deux semaines, le sentiment des investisseurs a basculé de la complaisance à la panique. Ce qui avait débuté par une diminution de l’exposition au risque liée au virus s’est transformé en capitulation généralisée sur de nombreux actifs.”
Les onze grands indices sectoriels du S&P 500 ont tous terminé largement dans le rouge, le plus gros recul affectant les valeurs de l’énergie et de la finance, celles-ci étant particulièrement sensibles à la chute des rendements obligataires.
Sur le Dow Jones, l’action Boeing est la plus affectée, perdant 13,4%: au marasme ambiant est venu s’ajouter le rejet par l’agence fédérale de l’aviation (FAA) d’une proposition del’avionneur concernant son 737 MAX toujours cloué au sol.
Parmi les valeurs technologiques, Apple perd 7,9%: des statistiques ont montré que la marque avait vendu, coronavirus oblige, moins de 500.000 smartphones en Chine au cours du mois de février.
SUR LE MARCHÉ PÉTROLIER, l’annonce saoudienne a évidemment entraîné les cours par le fond. Le baril de brut de Brent a fini la journée sur un recul de 24,1%, cédant 10,91 dollars à $34,36 le baril. Le brut léger américain West Texas Intermediate (WTI) a perdu 25,02% à 30,95 dollars le baril.
Le pétrole n’avait plus autant baissé sur une journée depuis la guerre du Golfe, en 1991.
“Personne n’imaginait que l’Arabie saoudite déclencherait une guerre des prix”, souligne Jim Vogel, spécialiste des taux d’intérêt chez FHN Financial à Memphis, Tennessee. “Subitement, il faut réévaluer ce qui pourrait l’impacter”, ajoute-t-il.
Au-delà de la rupture au sein de l’”Opep+” et du revirement stratégique de Ryad, le marché se prépare à une diminution durable de la demande mondiale de brut: selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), celle-ci devrait accuser cette année sa première baisse depuis 2009.
“Le pronostic pour le marché pétrolier est encore plus dramatique qu’en novembre 2014, quand une précédente guerre des prix avait débuté, parce qu’elle coïncide cette fois avec un effondrement significatif de la demande de pétrole due au coronavirus”, indique Goldman Sachs dans une note.