« Bouteflika abdique » : c’est le grand titre d’El Watan. Le départ du président algérien était réclamé par la rue depuis 38 jours. Il devrait démissionner avant la fin officielle de son mandat, le 28 avril.
« Les choses semblent s’accélérer, constate le quotidien gouvernemental El Moudjahid, dans la perspective de résoudre la crise à laquelle notre pays a été confronté depuis la décision du report de l’élection présidentielle qui a servi de déclencheur à un mouvement populaire citoyen d’une grande ampleur, dont les aspirations fondées et légitimes doivent être prises en charge. »
Pour autant, relève le site d’information TSA, « l’annonce de la démission de Bouteflika ne résout pas la crise. » Il faut voir ce que va décider le président dans les prochains jours. En effet, pointe TSA, « le chef de l’État, avant de démissionner, ‘devrait prendre d’importantes mesures pour assurer la continuité du fonctionnement des institutions de l’État durant la période de transition’. »
Quelles mesures ?
Quelles seront ces mesures ? Pour l’instant, on en est réduit aux supputations… En tout cas, poursuit TSA, « Bouteflika a encore quatre semaines pour tenter de sauver le plan de sortie de crise du pouvoir, d’autant plus que ses prérogatives constitutionnelles lui laissent une certaine marge de manœuvre dans ce sens. »
Ainsi, il pourrait encore nommer un nouveau Premier ministre, revoir la composition de l’équipe actuelle, remplacer Abdelkader Ben Salah à la tête du Sénat, pour que celui-ci ne gère pas la transition. Autant de mesures réclamées par le peuple. « Pour convaincre de sa bonne foi, Bouteflika pourrait aussi effectuer des changements au niveau de certaines institutions importantes, comme les médias publics ou encore la Banque d’Algérie… » En tout cas, conclut TSA, « les événements qui s’accélèrent laissent penser que la crise est loin de connaître son épilogue. »
Retour à la case départ ?
Dans la presse ouest-africaine, on est partagé entre méfiance et satisfaction…
« Ainsi donc, constate Aujourd’hui au Burkina, Bouteflika, président partant, mais pas encore parti se donne quatre semaines pour tout baliser avant de faire valoir ses droits à la retraite. » Mais que doit-il baliser ? « Est-ce le temps de ‘caser’ certains de ses protégés ? Est-ce pour permettre d’obtenir des garanties judiciaires pour certains de ses proches, avant de quitter le pouvoir ? Quel rôle sera dévolu au général Salah, qui, bien qu’il ait poussé pour l’application de l’article 102 de la Constitution, semble demeurer un pion de Boutef ? »
« Que va-t-il se passer maintenant, s’interroge en écho Wakat Séra, l’armée, qui dit avoir épousé la cause du peuple, ayant tracé désormais une ‘ligne rouge’ aux manifestants en les contraignant à demeurer dans les balises constitutionnelles ? Or, pointe le site burkinabè, la rue, assoiffée d’alternance, ne veut pas entendre parler de continuité. En effet, le départ de Bouteflika devrait entraîner la prise en main du pays par le président du Conseil de la nation, le sénat algérien, et l’organisation au bout de 90 jours, d’un scrutin, probablement par les mêmes caciques du système Bouteflika qui, en plus de maîtriser les rouages électoraux, auront eu le répit nécessaire pour se remettre en ordre de bataille. Et retour à la case départ, s’exclame Wakat Séra. La nouvelle option risque donc d’être rejetée par la rue, le déficit de confiance entre les dirigeants et le peuple étant devenu abyssal. »
Un arrangement rejeté par la rue…
Le Monde Afrique renchérit : « le scénario qui se dessine est donc celui d’un intérim de courte durée géré par le pouvoir en place pour aller vers l’élection présidentielle.
Or, constate le journal, cette option est très largement refusée par les acteurs de la contestation populaire. Ces derniers réclament la mise en place d’un gouvernement de transition composé de personnalités indépendantes et une période de transition plus longue avant d’aller à une élection constituante ou un scrutin présidentiel. »
« Au fond, relève encore Le Monde Afrique, le bras de fer entre l’armée et la présidence se solde par un arrangement qui convient aux deux parties, mais pas à la contestation. Il s’agit précisément du scénario craint et rejeté par les protestataires, celui d’une transition administrée par le régime lui-même. »
Et Le Monde Afrique de constater que « les appels à manifester une nouvelle fois +avec force+ vendredi 5 avril se multiplient déjà sur les réseaux sociaux. »
Rfi