Le chantier d’un « village Alzheimer », inédit en Europe, commence ce lundi à Dax dans les Landes, pour héberger 120 malades et où seront expérimentées des thérapies alternatives contre cette pathologie incurable du vieillissement. Un projet qui commence à prendre forme alors qu’à partir du 1er août plusieurs médicaments anti-Alzheimer ne seront plus remboursés.
L’ex-ministre socialiste Henri Emmanuelli n’aura pas vu la concrétisation d’un projet que lui avait inspiré en 2013 le modèle néerlandais de Weesp, près d’Amsterdam, et qu’il a impulsé à la tête du conseil départemental des Landes jusqu’à sa mort en 2017.
Un volet recherche dans ce projet
Comme à Weesp, tout sera mis en œuvre au « village » de Dax, qui ouvrira ses portes fin 2019 en pleine ville, « pour maintenir la participation des résidents à la vie sociale », explique le Professeur Jean-François Dartigues, neurologue et épidémiologiste au CHU Pellegrin à Bordeaux.
Mais à Dax, on aura un atout supplémentaire sur le modèle néerlandais. Le « village intègre un pôle Recherche qui mènera une étude comparative avec les établissements traditionnels, de l’impact de nouvelles approches thérapeutiques sur les malades, les aidants et les soignant s », précise ce spécialiste d’Alzheimer, pilote du volet Recherche.
« A Weesp, poursuit-il, ces pratiques semblent marcher mais ce n’est pas démontré. A Dax, on veut évaluer leur exemplarité. Et si ça marche, il n’y a pas de raison de ne pas les répliquer ». Car aujourd’hui, Alzheimer et les démences apparentées touchent environ un million de malades en France avec une progression alarmante de 100.000 à 150.000 nouveaux cas par an, précise-t-il.
Pas de blouses blanches visibles
Les jeunes chercheurs cohabiteront au « village » avec 120 malades résidents, eux-mêmes accompagnés par une centaine de soignants et autant de bénévoles individuels ou associatifs. Entre autres initiatives originales, le « village » accueillera des « chiens visiteurs », dressés pour aider les résidents à sortir de l’isolement psychique où les a plongé la maladie.
L’objectif ? Mesurer l’impact de ces nouveaux modes de prise en charge moins médicamenteuse sur la qualité de vie du patient. Et ce, dans un environnement sans blouse blanche visible, où le patient peut renouer avec les rituels d’une vie presque ordinaire, à son rythme, à la mesure de ses capacités, et sans pression extérieure.
Chez un patient privé de ses repères temporels et spatiaux, « les troubles du comportement sont certes directement liés à la maladie, mais aussi sans doute aux contraintes extérieures qui le privent de sa liberté », selon le Pr Dartigues. L’hypothèse de travail privilégiée ici tient en une formule toute simple : « moins de contraintes extérieures, donc moins de troubles du comportement, et donc moins de psychotropes », résume-t-il.
Une architecture de village et pas d’hôpital
Les architectes du village landais ont parfaitement intégré dans sa conception la double exigence thérapeutique : maintien du lien social et souplesse dans l’accompagnement du malade. « Pas non plus d’architecture contemporaine », afin de maintenir l’ancrage dans la culture locale et assurer en douceur la transition entre domicile et « village ». Celui-ci sera conçu comme une bastide typique de la région et un lieu de convivialité.
« C’est donc une place carrée cernée d’arcades abritant tous les services : brasserie, salons de beauté et de coiffure, auditorium, bibliothèque-médiathèque et supérette », résume l’architecte. Une dizaine de studios permettront d’accueillir les familles ou chercheurs de passage.