Le président afghan se déplace à Mazar-i-Sharif, assiégée par les Taliban

Le président afghan se déplace à Mazar-i-Sharif, assiégée par les Taliban

La situation devient critique dans le nord de l’Afghanistan, où les Taliban assiègent la ville clef de Mazar-i-Sharif. Un nouveau contingent a été envoyé sur place et le président afghan Ashraf Ghani a fait le déplacement, mercredi, pour encourager des forces armées démoralisées.

Face à des troupes démoralisées après les nombreuses défaites de l’armée dans le nord de l’Afghanistan, le président afghan, Ashraf Ghani, est arrivé, mercredi 11 août, à Mazar-i-Sharif, la grande ville du nord assiégée par les Taliban. Il va tenter de coordonner la riposte face aux insurgés qui contrôlent désormais plus d’un quart des capitales provinciales du pays.

Les Taliban ont conquis dans la nuit Faizabad, capitale de la province du Badakhshan, dans laquelle ils n’avaient jamais pu pénétrer lors de leur ascension vers le pouvoir dans les années 1990. Ils contrôlent désormais neuf des 34 capitales provinciales de l’Afghanistan, toutes tombées comme des dominos, dont sept situées dans le nord au pays, une région qui leur avait pourtant toujours résisté.

Mardi, les Taliban avaient saisi Farah, dans l’ouest, et Pul-e-Khumri, dans le nord, à 200 km de Kaboul. Depuis vendredi, ils ont enchaîné les prises : Zaranj (sud-ouest), Sheberghan (nord), fief du célèbre chef de guerre Abdul Rachid Dostom, et surtout Kunduz, la grande ville du nord-est, ainsi que trois autres capitales septentrionales, Taloqan, Sar-e-Pul et Aibak.

La situation devenant critique dans le nord du pays, et le président Ghani s’est rendu mercredi à Mazar-i-Sharif, vers laquelle les Taliban tournent désormais toute leur attention.

Il devait y « vérifier la situation sécuritaire générale dans la zone nord » et « rencontrer des responsables sécuritaires, des dirigeants jihadistes, des notables et d’autres personnalités influentes », a indiqué le palais présidentiel dans un communiqué.

Un contingent de soldats envoyés à Mazar-i-Sharif

Ashraf Ghani devait ainsi vraisemblablement s’entretenir avec Mohammad Atta Noor, l’ex-gouverneur de la province de Balkh, dont Mazar-i-Sharif est la capitale. Cet homme fort du Nord a promis de résister « jusqu’à la dernière goutte de sang », ainsi qu’avec Abdul Rachid Dostom, son ancien vice-président.

Des images publiées dans la nuit sur les réseaux sociaux montraient le maréchal Dostom, puissant dirigeant d’ethnie ouzbèke, embarquer dans un avion pour Mazar-i-Sharif avec un large contingent d’hommes armés.

Les Taliban, qui convergent de plusieurs directions vers Mazar-i-Sharif, ont attaqué mardi des quartiers à la périphérie immédiate de la ville, mais ont été repoussés, selon un journaliste de l’AFP sur place.

La perte de Mazar-i-Sharif serait catastrophique pour le gouvernement, qui n’aurait plus aucun contrôle sur toute la moitié nord du pays. Cela permettrait aussi aux Taliban de reporter leurs efforts sur d’autres régions et peut-être même sur la capitale Kaboul.

Washington agacé par les défaites de l’armée afghane

Les Taliban ont lancé leur offensive en mai, au début du retrait final des troupes américaines et étrangères, mais leur avancée s’est accélérée ces derniers jours avec la prise de plusieurs centres urbains.

Le départ des forces internationales doit être achevé d’ici le 31 août, vingt ans après leur intervention dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis.

« Je ne regrette pas ma décision » de quitter l’Afghanistan, a assuré mardi le président américain, Joe Biden. Les Afghans « doivent avoir la volonté de se battre » et « doivent se battre pour eux-mêmes, pour leur nation ». Washington cache de moins en moins son agacement face à la faiblesse de l’armée de Kaboul, que les Américains forment, financent et équipent depuis des années.

Le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price, a ainsi souligné que les forces gouvernementales étaient « très supérieures en nombre » aux Taliban, et qu’elles avaient « le potentiel d’infliger des pertes plus importantes ». « Cette idée que l’avancée des Taliban ne peut pas être arrêtée », « ce n’est pas la réalité du terrain », a-t-il estimé.

Des Taliban aux portes du pouvoir

Doha a accueilli mardi une réunion internationale avec des représentants du Qatar, des États-Unis, de Chine, du Royaume-Uni, de l’Ouzbékistan, du Pakistan, des Nations unies et de l’Union européenne.

Les échanges se prolongeaient mercredi, l’émissaire américain, Zalmay Khalilzad, devant exhorter les Taliban « à cesser leur offensive militaire et à négocier un accord politique ». Or, en l’état actuel, un accord politique pourrait aboutir à la prise de pouvoir des Taliban à la tête de l’Afghanistan.

Le processus de paix entre le gouvernement afghan et les Taliban s’est ouvert en septembre dernier au Qatar, dans le cadre de l’accord conclu en février 2020 entre les insurgés et Washington prévoyant le départ total des troupes étrangères d’Afghanistan.

Mais les discussions sont au point mort. Au contraire, elles ont laissé place à des combats meurtriers, qui se sont accentués depuis le printemps 2021, dès l’annonce officielle du retrait des Américains.