Absence d’électricité à Thiallane : malheurs d’un villagequi depuis des années court derrière l’accès à l’électricité

Absence d'électricité à Thiallane : malheurs d’un villagequi depuis des années court derrière l’accès à l’électricité

Située dans la commune de Bassoul, Thiallane est l’une des îles du Saloum(région de Fatick). Depuis plusieurs années, ce village est confronté à un sérieux problème d’électricité. Jusque-là, les habitants ne voient pas encore le bout du tunnel. Reportage du journal « Enquete »
On dirait de la science-fiction, et pourtant c’est bien une réalité. À Thiallane, ne serait ce que pour charger son téléphone, c’est la croix et la bannière. Situé dans les îles du Saloum (région de Fatick), ce village est confronté à un sérieux problème d’électricité. Ce, depuis plusieurs années. Les témoignages de certains habitants font froid dans le dos.

“La situation est vraiment exécrable. Ici, il est impossible de décrire le calvaire que nous vivons. La quasi-totalité n’a plus accès à la télévision à cause du manque d’électricité. Chaque jour, on ne cesse de marcher avec le téléphone, la batterie vide. Il faut attendre des heures et des heures pour espérer la charger. Ce qui est invivable !
Une seule centrale photovoltaïque qui ne fonctionne plus
En 2005, Thiallane s’était doté d’une centrale électrique solaire. Depuis lors, le village s’approvisionnait en électricité tant bien que mal. Aujourd’hui, la structure est vieillissante et est complètement gâtée. Fodé, jeune homme, habitant du village, ne cache pas son amertume.

“Ce qui se passe dans notre village est inimaginable. Vivre cette situation au XX1e siècle est inadmissible. Notre centrale ne peut plus alimenter le village”. Selon les témoignages de certains, plusieurs personnes ont préféré vivre ailleurs à cause du manque d’électricité au village. Actuellement, beaucoup sont à Dakar. Pour acheter du gasoil, afin d’alimenter la machine, les villageois procèdent aux cotisations. Chaque maison participe à hauteur de 5000f CFA. Toutefois, depuis que la centrale est tombée en panne, il n’y a plus de solution possible pour s’offrir l’électricité

On se rabat sur les villages environnants… Très enclavé, Thiallane se trouve au cœur des îles du Saloum. Il partage, avec quatre autres villages, la commune de Bassoul. À quelques mètres de l’île, se trouve le village de Bassar. Pour s’y rendre, il y a une pirogue disponible pour le trajet. Alors que Bassar est bien alimenté en électricité, des jeunes thiallanois y envoient leurs téléphones pour charger les batteries.

“Ce qui est regrettable”, de l’avis de Bouba, un jeune du village. Une fois à Bassar, les téléphones peuvent y passer toute la journée. Cette situation est d’autant plus compliquée que Thiallane est entièrement entouré d’eau et de mangroves (palétuviers). C’est pourquoi, partant de là, il n’est pas possible de rallier d’autres localités à pied à cause du bras de mer qui ceinture le village.

Par conséquent, il faut emprunter une pirogue ou aller par la nage, comme le font parfois les jeunes. Si l’on s’en tient aux explications de certains férus du football, avec l’électricité qui fait défaut, on part parfois ailleurs à bord d’une pirogue à pagaie pour suivre les matchs de football, l’exemple des championnats qui se jouent tous les weekends.
“Nous sommes obligés de partir à Bassar pour pouvoir regarder les matchs à la télévision”, révèle le jeune Mamadi

Pour boire de l’eau fraîche…

Pour avoir de l’eau fraîche, il faut attendre les vendeuses qui vont à Bassar pour chercher de la glace qu’elles vont revendre à Thiallane. Chaque jour, une file de récipients est établie dans la maison des revendeuses. Les intéressés vont très tôt déposer leur pot ou autres ustensiles en attendant l’arrivée de la glace. Un client renseigne :

“C’est grâce à ces braves dames du village, qui achètent de la glace à Bassar que nous arrivons à boire de l’eau fraîche. Chaque jour, on les attend chez elles”. Cependant, la quantité achetée n’arrive jamais à assouvir les besoins de la population. Tout de même, les revendeuses fournissent beaucoup d’efforts dans cette activité. “Après avoir traversé le bras de mer à l’aide d’une pirogue, nous portons sur la tête, les bassines pleines de glace. Nous marchons sous le chaud soleil. C’est une tâche très difficile, mais on n’a pas le choix”, fait savoir l’une des revendeuses. Une fois à Thiallane, la glace est revendue à 100f CFA l’unité

Quelques maisons dotées de panneaux solaires

Un brin d’espoir, c’est l’installation de panneaux solaires dans quelques maisons du village. Mais, le seul souci est que la demande est largement supérieure à l’offre. Lorsque le peu d’électricité existante est mis en marche, les gens prennent d’assaut les maisons qui en fournissent. C’est pourquoi d’ailleurs, l’alimentation dure peu de temps. On l’utilise pour quelques temps avant que le solaire ne faiblisse.

Il ne peut se passer un jour sans voir des jeunes qui sillonnent le village dans l’espoir de tomber sur l’électricité. Pendant la Coupe d’Afrique des Nations, les villageois se rassemblaient dans les quelques maisons dont il est question pour suivre les matchs. Mais, “très souvent, l’électricité nous lâchait en plein match”, déclare un jeune amateur. La finale, beaucoup l’ont écoutée à la radio, car ils n’avaient pas trouvé de place pour suivre le match, les quelques places disponibles étant occupées

Une situation qui gangrène l’épanouissement Cette situation ouvre la porte à d’autres maux. La santé par exemple. Le village de Thiallane abrite une case de santé dont le fonctionnement n’est pas des meilleurs. L’absence d’électricité est passée par là. Elle constitue un grand obstacle au fonctionnement de la structure sanitaire. La chaleur, par exemple, est un problème pour la gestion de certains médicaments.

Selon certains, cela porte préjudice au dépôt de médicaments construit en guise de pharmacie. Construit en 2003, la case de santé du village a attendu un peu plus de quinze ans pour fonctionner en 2021, mises à part les quelques interventions d’une matrone qui ont eu lieu de temps en temps au cours de son existence. Aujourd’hui, même si l’espoir est permis, avec l’arrivée d’un infirmier, d’ailleurs fils du village, il reste un long chemin à parcourir. Le bon fonctionnement de la case doit être en parallèle avec la disponibilité de l’électricité. Ce qui n’est pas encore le cas pour le moment.

Tentatives de solutions…

Bien que la situation reste compliquée, les habitants ne sont pas restés bras croisés. D’après plusieurs témoignages, des actions sont menées dans le sens de trouver des alternatives au problème de l’électricité. “Nous avons fait des démarches, avons écrit, parlé, mais jusque-là, le problème persiste”, laisse entendre un habitant. Mieux, une lettre adressée au Directeur Général de la Senelec a été rédigée par les populations.
Dans cette lettre, explique un responsable, “tous les problèmes du village liés à l’électricité sont exposés”. Aussi, poursuivent les témoignages, “dans le passé, des gens sont venus prendre des informations sur la centrale. Mais il n’ya eu aucun suivi.À ce propos, le cri du cœur du jeune Fodé ne tarde pas :

”Notre village souffre énormément de cette absence d’électricité. Aujourd’hui, il reste le seul véritable problème. Que les gens se soucient de nous car nous faisons partie du Sénégal et nous remplissons, au même titre que les autres,notre devoir civique”.
Mieux, d’aucuns informent que les villageois ont même créé des plateformes pour tenter de trouver des solutions. On peut citer entre autres, “Je suis Thiallane”, “SOS Écoles Thiallane”, “Jeunesse et actions…”

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