Au Chili, le président Piñera devant la justice pour des impôts non payés

Le président chilien Sebastián Piñera était convoqué, vendredi 7 juin, au tribunal local de Pucón, dans le sud du Chili. On lui reproche de ne pas avoir déclaré la fin des travaux de l’une de ses résidences secondaires. Mais si l’affaire choque une partie des Chiliens, c’est surtout parce que faute de déclaration de fin de travaux, le président a échappé pendant trente ans au paiement des impôts locaux sur sa luxueuse propriété.

De notre correspondante à Santiago,

Les faits ont été révélés par un média chilien, et depuis, l’opposition s’indigne publiquement de cette affaire : un député démocrate-chrétien a lui-même porté plainte dans cette affaire, et obtenu du tribunal l’organisation d’une confrontation avec le président, dans une quinzaine de jours. Pas sûr que Sebastián Piñera fasse le déplacement, car ce vendredi 7 juin, il a envoyé l’un de ses avocats présenter sa version des faits devant le tribunal. Le président, qui est aussi l’une des cinq personnes les plus riches du Chili, risque au maximum une amende d’environ 6 200 euros.

Mais par ailleurs, faute d’avoir déclaré la fin des travaux sur sa propriété, il a payé seulement quelques centaines de pesos d’impôts par an sur sa résidence secondaire, soit moins d’un euro par an, et ce pendant trente ans. Car son terrain d’une vingtaine d’hectares, où il a construit plusieurs maisons au bord d’un lac dans le sud du Chili, est resté évalué par le fisc au prix d’un terrain non construit. C’est donc le deuxième volet de cette affaire : le trésor public doit évaluer combien d’arriérés d’impôts devra payer le président chilien. Pour l’instant, Sebastián Piñera n’aurait à payer que trois ans d’arriérés d’impôts, à cause des délais de prescription. L’opposition de gauche demande toutefois à ce qu’il verse au trésor public l’intégralité des impôts impayés depuis 30 ans.

Une affaire qui tourne à la bataille politique

Un député de droite, issu du même parti que Sebastián Piñera, a répliqué il y a quelques jours, en présentant une plainte contre l’ancienne présidente de gauche Michelle Bachelet, qui était au pouvoir encore jusqu’à l’an dernier. Elle possède une propriété plus modeste, au bord du même lac que Sebastián Piñera, et ce député affirme donc qu’elle n’a pas non plus déclaré la fin des travaux de sa maison, et que ses impôts ont aussi été sous-évalués.

Michelle Bachelet est en ce moment loin du Chili, elle occupe un poste important à l’ONU. Mais pour Sebastián Piñera, cette affaire tombe plutôt mal car sa cote de popularité est au plus bas en ce moment, sous les 30% d’après certains sondages. Il a dû se justifier ces dernières semaines d’avoir invité ses deux fils adultes à un voyage officiel en Chine, où ils ont participé à des réunions avec des chefs de grandes entreprises chinoises.

Sans compter que la start-up créée par le fils du président a bénéficié de plusieurs contrats publics depuis que son père est revenu au pouvoir l’an dernier, pour un second mandat. Le jeune homme a officiellement quitté la direction de l’entreprise. Mais ces révélations ont embarrassé la Moneda, le palais présidentiel. Sebastián Piñera a même fini par s’excuser. Tout cela alors que la croissance devrait cette année être plus faible que prévu, et que la majorité au pouvoir défend en ce moment un très sensible projet de réforme des retraites devant le Parlement.

 

Rfi