Près de 2000 personnes ont manifesté dimanche à Maiduguri (nord-est), épicentre de l’insurrection jihadiste de Boko Haram au début des années 2000. Cette manifestation visait à dénoncer les dérives de certaines milices d’auto-défense. Pour rappel, ces milices ont été mises sur pied en 2013. À l’origine, ces groupes étaient formés de volontaires, prêts à chasser les éléments de Boko Haram hors de Maiduguri. Ces comités de vigilance sont devenus des milices civiles, souvent difficiles à contrôler, mais qui servent de force supplétive aux côtés des forces de sécurité.
Tout est parti de la mort samedi soir, d’un conducteur de moto-taxi… Un chauffeur tué par des miliciens d’un groupe d’auto-défense, qui effectuait une patrouille nocturne. Problème : le conducteur a été interpellé bien avant le début du couvre-feu, fixé à 22h. Dans les rues de Maiduguri dimanche, des jeunes ont manifesté pour réclamer l’interdiction de ces milices. Les manifestants réclament justice.
La disparition du chauffeur samedi met en lumière « le degré de violences commises par ce type de milices envers les présumés jihadistes, tout comme les civils », commente un observateur.
Plusieurs experts expriment leur inquiétude concernant le statut flou de ces groupes, qui apportent leur aide dans la lutte contre Boko Haram, mais dont les méthodes sont parfois contestables, comme l’explique Isa Sanusi, d’Amnesty International. « Les milices civiles d’auto-défense sont de plus en plus influentes. Elles commettent de plus en plus d’actes inacceptables, comme le recours à la torture. Mais il est très difficile de les poursuivre en justice. En effet, les succès engrengés sur le terrain dans la lutte contre Boko Haram – grâce par exemple, à leur contribution en termes de renseignements – aux côtés des forces de sécurité, les gens ont peur de remettre en cause leurs actions. Les autorités estiment que ces groupes ont consenti de tels sacrifices, qu’il est bien difficile de critiquer leurs interventions. »
À court terme, ce chercheur préconise notamment des formations sur les droits humains, afin d’éviter toute autre dérive. En février 2017, International Crisis Group, préconisait à moyen terme une plus forte présence des autorités locales dans le bassin du lac Tchad. Les comités de vigilance devraient être « progressivement démantelées ou formalisées » lit-on dans ce rapport.
Chronologie et chiffres clés