En Haïti, le chef de l’ONU réclame une force armée internationale pour aider le pays à sortir de la crise

En Haïti, le chef de l’ONU réclame une force armée internationale pour aider le pays à sortir de la crise

Alors que la situation sécuritaire et sanitaire ne cesse de s’aggraver et que l’Etat haïtien est « paralysé », Antonio Guterres exhorte les membres des Nations unies à lui venir en aide.

Le secrétaire général des Nations unies (ONU), Antonio Guterres, a réclamé, dimanche 9 octobre, le déploiement d’une force armée internationale en Haïti, pays extrêmement pauvre des Caraïbes « paralysé » par une crise sécuritaire « dramatique » sous l’emprise de bandes criminelles et sous la menace du choléra.

« [M. Guterres] exhorte la communauté internationale, y compris les membres du Conseil de sécurité, à examiner en urgence la demande du gouvernement haïtien de déployer sans délai une force armée spécialisée internationale pour faire face à la crise humanitaire », a fait savoir son porte-parole, Stéphane Dujarric, dans un communiqué. Le secrétaire général de l’ONU « demeure extrêmement préoccupé par la situation en Haïti, qui fait face à une flambée de cas de choléra dans un contexte de détérioration dramatique de la sécurité qui a paralysé le pays » des Caraïbes, selon le porte-parole.

Le prochain Conseil de sécurité consacré à la crise en Haïti est prévu le 21 octobre, mais M. Guterres a d’ores et déjà envoyé dimanche au Conseil « une lettre présentant des options pour un soutien renforcé à la sécurité », conformément à la résolution 2645 adoptée le 15 juillet, a expliqué la même source. Cette résolution a prorogé d’un an le mandat du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (Binuh), une structure qui a remplacé la Mission onusienne de maintien de la paix et qui tente d’aider la police locale.

Résurgence du choléra

Dans la lettre remise par M. Guterres au Conseil de sécurité, et obtenue par l’Agence France-presse (AFP), le chef de l’ONU dénonce aussi « les bandes criminelles qui ont pris le contrôle d’infrastructures stratégiques, telles que le port international de Port-au-Prince et le principal terminal de carburant du pays (Varreux) ». En outre, s’alarme-t-il, « il y a dans ce contexte une résurgence du choléra et la situation actuelle a créé les conditions parfaites pour une hausse exponentielle [des cas] dans tout le pays ».

L’ONU avait déjà mis en garde jeudi contre un risque d’« explosion » des cas de choléra dans le pays. Après l’introduction de la bactérie par des casques bleus en 2010, une épidémie a sévi jusqu’en 2019, faisant plus de 10 000 morts. L’annonce, dimanche, de nouveaux cas et de sept premiers morts a réveillé les craintes d’un nouveau désastre au moment où, avec la dernière poussée de violence, le pays manque de carburants pour alimenter la population en eau potable et faire tourner les hôpitaux.

Depuis la récente détection du bacille du choléra, qui se transmet par l’eau, onze cas ont été confirmés et 111 sont suspectés, pour l’instant uniquement dans la capitale Port-au-Prince, avait déclaré, jeudi, lors d’une conférence de presse par vidéo depuis Haïti la coordinatrice humanitaire de l’ONU dans le pays, Ulrika Richardson. Mais « les chiffres pourraient être bien plus élevés », selon elle, précisant que des analyses étaient en cours à l’étranger pour déterminer s’il s’agissait ou non de la même souche qu’en 2010.

« Un nouveau degré de désespoir »

Depuis l’annonce, le 11 septembre, par le premier ministre, Ariel Henry, d’une hausse des prix des carburants, le pays a été le théâtre de nouvelles violences, de pillages et de manifestations. Et depuis la mi-septembre, le terminal pétrolier de Varreux, le plus important du pays, est donc bloqué par des gangs armés.

A la fin de septembre, deux responsables de l’ONU avaient décrit devant le Conseil de sécurité une « catastrophe humanitaire » dans ce pays pauvre, où la situation a atteint « un nouveau degré de désespoir » et avaient prédit que cette année « 4,5 millions de personnes [allaient se retrouver] en niveau d’insécurité alimentaire de crise ou pire, dont 1,3 million en situation d’urgence ».

Haïti est englué depuis des années dans une profonde crise économique, sécuritaire, politique et l’assassinat du président Jovenel Moïse en 2021 a aggravé la situation avec une emprise de plus en plus forte des gangs.