La zone CFA va donc disparaitre dès 2020, selon l’annonce faite ce samedi 21 décembre à Abdijan par les présidents ivoirien Alassane Ouattara et français Emmanuel Macron. La France se retire des instances de gestion du CFA qui peut donc opérer sa mutation en zone éco. Il reste que les calendriers de mise en œuvre sont encore flous.
Officiellement, le nouvel accord monétaire signé entre Paris et les pays de la zone UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) prend effet immédiatement. Dans la réalité, la mise en œuvre de ces dispositions débutera en 2020, après juin, au moment des bilans annuels. La France quittera alors le navire.
Si les principes de fonctionnement de l’éco sont acquis, il faut maintenant résoudre des questions techniques. À quelle date les nouveaux billets seront-ils imprimés ? Quand entreront-ils en vigueur ? Il faudra plusieurs années précise à RFI le ministre béninois des Finances, Romuald Wadagni, avant de pouvoir tenir l’éco dans sa main. Si l’ex-zone CFA d’Afrique de l’Ouest constituera l’avant-garde, à quelle date les autres pays de la Cédéao (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest) vont-ils rejoindre la zone éco et adopter cette monnaie ?
Il y a tout un processus avec des dispositions qui prennent du temps. L’histoire de la monnaie commune en Europe, l’euro, est assez édifiante dans ce sens.
Encore de gros efforts pour la Cédéao
Jusqu’à présent, la Cédéao avançait la date de 2020, mais ce n’est plus certain indiquait samedi 21 décembre la ministre des Finances du Nigeria, Ngonzi Okonjo-Iweala. Car au sein de la Cédéao les pays ne respectent pas suffisamment les critères de convergence.
Ces critères, comme le taux d’inflation ou le déficit budgétaire doivent être peu ou prou alignés dans tous les pays, afin d’assurer que la monnaie commune soit stable. Le travail à faire est donc encore long. Mais ce qui est espéré, c’est que la transformation de la zone CFA en zone éco donne une impulsion nouvelle à tous les pays de la Cédéao.
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L’aboutissement de trois années de réflexion et de six mois d’action
Annoncée en grande pompe à Abidjan par le président ivoirien, Alassane Ouattara, la réforme du franc CFA de l’Afrique de l’Ouest est l’aboutissement d’un processus de réflexion vieux d’au moins trois ans.
C’est une confidence faite par un ancien Premier ministre ouest-africain. Il se souvient avoir assisté à un déjeuner entre les présidents du Gabon, Ali Bongo, et de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, lors d’un forum économique en 2016. À l’époque déjà, les deux hommes s’interrogeaient sur la nécessité d’en finir avec le fameux compte d’opération du Trésor français, celui où les membres des zone franc logent la moitié de leur réserves de change. Un outil décrié par les partisans d’un abandon du CFA qui y voient une relique néo-coloniale. Car depuis plusieurs mois déjà les anti-CFA donnent de la voix, notamment via l’économiste togolais Kako Nubukpo, dont les positions rencontrent un fort écho en Afrique.
En 2017, le discours français change radicalement. À Ouagadougou, Emmanuel Macron affirme que c’est aux Africains de proposer une réforme. La réflexion commence en coulisse. Elle s’accélère en juin dernier. Pendant six mois, sous la houlette de la Banque de France et de la BCEAO, les dirigeants se mettent au travail. Deux camps apparaissent au sein des pays de l’Umoa. Le Niger et le Burkina Faso plaident pour un arrimage de la future monnaie à un panier de devises, conformément aux souhaits de la Cédéao, mais le Sénégal et la Côte d’Ivoire réclament un arrimage avec l’euro uniquement, au nom de la continuité. Ils finiront par avoir gain de cause.
rfi