Pour le deuxième jour de mobilisation, la grève des cheminots a encore été très suivie ce mercredi 4 avril. Elle reprendra dimanche. Ces deux journées de forte participation ont renforcé la détermination des grévistes.
Encore une fois, la grève à la SNCF a été très suivie ce mercredi. D’après la direction de la compagnie ferroviaire, ils étaient un peu moins de 30 % de grévistes à la mi-journée. Mais les trois quarts des conducteurs de train et près de la moitié des aiguilleurs étaient mobilisés. Résultat, un trafic très perturbé avec en moyenne un TGV sur sept et un train régional sur cinq.
La circulation normale reprendra progressivement dès jeudi matin pendant deux jours, avant un retour à la grève samedi soir, conformémement au calendrier « perlé » décidé par l’intersyndicale. SUD-Rail, favorable à une grève illimitée reconductible toutes les 24 heures, a finalement décidé de ne pas s’y engager dans l’immédiat.
« On ne va pas s’arrêter là »
Lors de leur assemblée générale, les cheminots de la gare du Nord ont ainsi voté, comme partout en France, en faveur de la poursuite du mouvement. « On a des taux de grévistes historiques. C’est impressionnant et ça met du baume au cœur. Il ne faut pas s’arrêter là, il faut y croire », lance Renaud, conducteur de train depuis 27 ans et militant Force ouvrière. « On pense qu’il faut faire reculer Macron, que notre cause est juste. On ne se bat pas uniquement pour les cheminots, mais plus largement pour le service public. On est ultra déterminés, on ne veut surtout pas s’arrêter là », confirme Xavier.
Comme pour mettre la pression sur les grévistes, le PDG de la SNCF Guillaume Pépy a affirmé que chaque jour de grève représentait un coût de 20 millions pour l’entreprise ferroviaire. Mais le propos n’impressionne pas Florian Capelle, de la CGT-Cheminots. « S’il y a 36 jours de grève, cela fait 700 millions. Aujourd’hui, on verse chaque année 1,5 milliard d’intérêts aux banques pour une dette d’aménagement du territoire mis en place par l’Etat », rappelle-t-il.
Plus globalement, la grève pèse et continuera de peser sur les entreprises françaises, et notamment sur le secteur du tourisme. Renaud est favorable à un ralentissement de l’économie. Il espère que cela poussera les patrons du CAC 40 « copains de Macron » à le faire plier en faveur des cheminots.
Agent de maintenance depuis 28 ans, Patrick rêve quant à lui de passer à la vitesse supérieure : « Il faut que ça prenne de l’ampleur, qu’on obtienne le soutien des citoyens. Parce qu’ils sont concernés comme nous, ce sont eux qui utilisent le transport public. Et il faut aussi qu’on ait le soutien des autres corporations professionnelles. » Etudiants, éboueurs, électriciens, la liste est longue. Les cheminots misent sur une convergence des luttes pour faire céder le gouvernement. L’exécutif affiche pour sa part une inflexibilité totale et appelle au dialogue.
Les usagers au centre du bras-de-fer
Au milieu du conflit, des millions de Français qui ont du mal à voyager. Et qu’ils soient grévistes ou non grévistes, les cheminots disent tous agir en faveur des voyageurs.
Aziz Alane est conducteur de train. S’il a décidé d’entrer en grève comme beaucoup de ses collègues, c’est aussi pour donner aux messages aux usagers. « J’ai envie de leur dire qu’aujourd’hui, on se bat aussi pour eux. Il faut qu’ils le comprennent. Aujourd’hui, il y a moins de trains, c’est sûr, mais c’est pour que demain il y en ait plus, et de meilleure qualité. L’ouverture à la concurrence, ce sera moins de trains, et une qualité bien moindre, comme cela s’est passé dans le monde entier. »
Faux, lui répond Elisabeth Borne, ministre des Transports, qui promet plus de trains, plus de services et des billets moins chers. Un avis que ne partage pas Fabien Villedieu, délégué général du syndicat Sud-Rail. Pour lui, la grève, il fallait passer par là : « c’est pénible de ne pas avoir de train, sauf qu’aujourd’hui les enjeux sont là : la casse de la SNCF, la case du service public. Et le service public, il n’y a pas que les cheminots qui en bénéficient, c’est avant tout les voyageurs. »
Trouver une solution rapide au conflit, c’est ce que souhaite Amar Chaabi, directeur de la gare de Lyon et cheminot. Il a choisi de travailler et de se ranger du côté des voyageurs. « Je ne suis pas gréviste, pour la simple et bonne raison que je suis là pour les voyageurs et que je suis là pour l’entreprise. Je comprends l’agacement et l’irritation des voyageurs, on espère que la grève puisse s’arrêter parce qu’elle ne bénéficie pas à grand-monde, cette grève… »
Et si elle va jusqu’à son terme, le 28 juin prochain, peu de chance que la relation entre cheminots et usagers s’améliore.
rfi