L’Arabie saoudite, nouvelle Mecque du football globalisé

La liste des joueurs et entraîneurs étrangers enrôlés dans le championnat d’Arabie saoudite commence à s’allonger. Particulièrement durant ces deux derniers « mercato », où ils ont grossi les rangs des équipes du championnat local.

Le royaume saoudien, destination prisée du football mondial ? Ces derniers mois ont vu émerger au Moyen-Orient un nouvel acteur, riche et très actif. Jusqu’à présent, les joueurs signaient plus souvent dans les clubs des Emirats voisins, et principalement au Qatar, pays qui a misé sur la diplomatie du sport depuis plus longtemps. Efforts couronnés par l’organisation de la Coupe du monde de 2022, et visibles à travers l’équipe qu’ils ont achetée, le Paris Saint-Germain.

Les équipes saoudiennes recrutent en Turquie

« L’Arabie saoudite est la nouvelle Chine des transferts périphériques, estime Nabil Djellit, journaliste à France Football et sur la chaîne L’Equipe. Depuis la taxe infligée par Pékin limitant les achats de joueurs étrangers, les clubs saoudiens attirent à leur tour de nombreux footballeurs venant de partout, et bien plus jeunes qu’avant, pas seulement en fin de carrière. Ils reçoivent de belles propositions, financièrement très intéressantes, sans être des Top Players. »

Lors du mercato de l’été 2018, les équipes saoudiennes ont ainsi su profiter de l’effondrement de la livre turque pour débaucher de bons joueurs en Turquie, comme Bafétimbi Gomis, l’ancien buteur de l’Olympique lyonnais, passé de Galatasaray au Al Hilal de Riyad, qui est en tête de la SPL, Première ligue saoudienne, pour environ 8 millions d’euros. Du même club d’Istanbul, Younès Belhanda, milieu de terrain des Lions de l’Atlas en Russie 2018, serait actuellement courtisé par Ittihad FC, pour 6 millions net d’euros par an.

Beaucoup d’internationaux algériens

Ils ne sont pas les seuls recrutés cet été ! Autres arrivées notables : celle du Nigérian Ahmed Musa, passé de Leicester City à Al-Nasr de Riyad pour 16,5 millions d’euros. Ou les internationaux marocains titulaire au dernier Mondial, Nordin Amrabat (Leganes / Al Nasr Riyad) Manuel Da Costa (Basaksehir à Ittihad FC) et Karim El Ahmadi passé de (Feyenoord / Ittihad FC). De très nombreux internationaux algériens peuplent aussi les 16 équipes du championnat saoudien : « Presque une équipe », s’amuse Nabil Djellit.

Ce championnat commence à émerger régionalement, pour l’instant dans le domaine des recrutements, par la volonté des dirigeants saoudiens, et notamment du fils du roi. Mohamed Ben Salman veut, lui aussi, utiliser le sport pour modifier l’image de son pays. Des infrastructures sont en chantier, pour soutenir cette ambition surgie dans un contexte régional et géopolitique particulier : depuis juin 2017, les Qatariens sont diplomatiquement isolés sur leur péninsule, des Emirats voisins et de l’Arabie saoudite. Les Saoudiens aimeraient sans doute leur ravir leur rayonnement grâce au sport.

Un changement dans ce dessein qui n’est pas anodin : le règlement du championnat autorise désormais 8 joueurs étrangers en SPL, et 7 au lieu de 3 en 2° division saoudienne. Une porte ouverte, peut-être temporairement comme en Chine, mais sûrement destinée à gonfler les effectifs d’internationaux, et donc d’attirer immédiatement la lumière, et les regards.

Beaucoup d’étrangers aussi comme entraîneurs

« Une remarque, suggère Frank Simon, journaliste à France Football, ces clubs ne font pour le moment, pas confiance à des gardiens de but saoudiens. Ils sont très nombreux dans les cages à venir d’ailleurs, à l’exemple de Raïs M’boli, l’international algérien actuellement gardien de l’Ettifaq FC de Dammam. Beaucoup d’Africains comme Blé Zadi Horthalin, meilleur gardien de D2 en Côte d’Ivoire avec 10 « clean sheet », qui a signé pour 2 ans au Nahda Sport Club. »

Beaucoup d’étrangers aussi comme entraîneurs : l’Egyptien Mido au Wehda, le Croate Slaven Bilic à l’Ittihad, le Portugais Jorge Jesus au Hilal de Riyad, à tel point qu’un seul club de SPL est dirigé par un Saoudien : Youssef Al Ghadeer, au Al Batine FC. L’équipe nationale d’Arabie saoudite a eu pour sélectionneur l’espagnol Juan Antonio Pizzi, avec qui les faucons ont battu, ô gloire, l’Egypte de Mohamed Salah, marquant 3 points en Coupe du monde en Russie. Plusieurs internationaux avaient fait des stages en Espagne avant le Mondial, pour améliorer leur niveau.

Une limite à l’attrait du championnat saoudien, selon certains témoignages : les conditions de vie et le quotidien en Arabie saoudite, pour les joueurs habitués à une vie sociale plus libre. Les femmes ne peuvent en effet pas aller librement au stade.

La prochaine étape sera peut-être celle des investissements dans de très grands clubs européens, pour des Saoudiens fortunés. « Il y a eu des rumeurs d’arrivée de capitaux saoudiens autour de Manchester United ou Liverpool, assure Nabil Djellit. Ça ne s’est pas fait, mais qui sait si l’Olympique de Marseille n’intéresserait pas un prince saoudien ?! »