La campagne DéChol Occitanie vient d’être lancée. Médecins, pharmaciens et biologistes s’unissent pour dépister les cas d’hypercholestérolémie familiale. Leur arme : l’analyse génétique.
Vos analyses indiquent un taux de «mauvais» cholestérol très élevé, et si c’était génétique ? Cette question, ni farfelue, ni anodine, pourrait bien vous être posée par votre médecin généraliste, votre pharmacien ou le biologiste à qui vous confiez vos analyses. Dans le cadre d’une campagne baptisée «DéChol Occitanie», les professionnels de santé de l’ancienne région Midi-Pyrénées s’allient pour dépister l’hypercholestérolémie familiale et pouvoir ainsi proposer des traitements à des patients surexposés au risque de déclarer une maladie cardiovasculaire.
30 000 personnes concernées dans la région
Ils seraient près de 30 000 en Occitanie selon les calculs du Pr Jean Ferrières, à l’origine du projet. «Je voudrais ne plus voir, dans le service des soins intensifs de cardiologie, des patients qui racontent que leur père, leur grand-père, leur frère ont eu des infarctus ou des AVC (accident vasculaire cérébral) avant eux », souligne le cardiologue, co-auteur de la première étude sur les liens entre un taux très élevé de LDL-cholestérol (souvent appelé «mauvais cholestérol) et une mutation génétique transmise d’une génération à l’autre (lire encadré). «Pouvoir connaître cette mutation change tout ! Quand on sait, aujourd’hui, la défiance des patients vis-à-vis des traitements anti-cholestérol (statines), on ne peut plus s’arrêter à l’analyse clinique. La connaissance du facteur génétique nous fait passer de la médecine prédictive à la médecine personnalisée : nous pouvons proposer des traitements pour réduire les risques et dépister les autres membres de la famille », ajoute Jean Ferrières. Selon lui, les chiffres ne sont pas à négliger : l’exposition des artères à un taux de LDL- cholestérol élevé depuis la naissance expose à des accidents cardiovasculaires précoces. Une personne, porteuse de la mutation génétique d’hypercholestérolémie familiale et ne suivant pas de traitement (statines), voit son risque de présenter une maladie coronarienne multiplié par 13 par rapport à la population générale.
«Neuf patients sur dix ignorent qu’ils sont porteurs d’une hypercholestérolémie familiale. Le programme DéChol Occitanie permet pour la première fois d’articuler le monde de la médecine libérale et de l’hôpital. Nous avons mis du temps, c’est vrai, par manque de coordination, mais nous allons pouvoir agir. Un test génétique, ce n’est pas compliqué, c’est un outil de prévention efficace et précoce », explique le Dr Yvan Macheto, de l’Union des médecins libéraux d’Occitanie (URPS).
Repères
Le chiffre : 13
fois > Plus de risque cardiovasculaire. L’hypercholestérolémie familiale est une des maladies génétiques les plus fréquentes en France (estimation à 260 000 personnes). Non traitée, elle augmente le risque de maladie cardiovasculaire (infarctus du myocarde, AVC, angine de poitrine) de 13 fois par rapport à la population générale.
« Avec la défiance des patients pour les traitements, on ne peut plus s’arrêter à l’analyse clinique»
Pr Jean Ferrières, cardiologue, CHU Toulouse
Étude toulousaine publiée
A partir d’une série de 632 patients, une équipe de cliniciens-chercheurs de Toulouse et Paris a démontré l’intérêt de la génétique pour prédire le risque de déclarer, très jeune, une maladie cardiovasculaire. Sur ces 632 patients, 344 présentaient une hypercholestérolémie (taux de LDL-cholestérol supérieur à 1,9 g/l ou à 1,6 g/l malgré un traitement pour le réduire). Les généticiens ont alors recherché la présence ou non d’une mutation à l’origine de l’hypercholestérolémie héréditaire, également appelée hypercholestérolémie familiale, qui peut se transmettre d’une génération à l’autre. Elle a été repérée chez 57 % d’entre eux. L’étude a noté que dans les cas d’origine génétique de la maladie, les patients présentaient des signes visibles lors de l’examen clinique (boules de graisse sous la peau au niveau de la paupière ou des tendons, anneau blanchâtre autour de la cornée). La découverte d’une mutation chez ces patients donne 3 fois plus de risque de faire un infarctus du myocarde prématurément.
Publication dans la revue de la Société Américaine de Cardiologie Préventive, Clinical Cardiology, au printemps 2018. Equipes de recherche : UMR 1027 Inserm-Toulouse 3 Paul-Sabatier ; fédération de cardiologie CHU de Toulouse ; service biochimie et génétique moléculaire AP-HP Paris ; UFR sciences de la santé Versailles