La mort d’un journaliste, qui s’était imbibé d’essence à Kasserine, dans le centre-ouest du pays, médiatise de nouveau un acte de protestation ultime en Tunisie : l’immolation par le feu.
Avant son action, le journaliste Abdel Razzaq Zorgui, avait posté une vidéo dénonçant les conditions de vie délétères de ses compatriotes et la dégradation de la situation économique de sa région.
Après sa mort par immolation, les villes de Kasserine, Tebourba et Jbeniana ont connu des nuits de violences. Jetant des pierres, enflammant des pneus, des manifestants ont vu dans la récente immolation du jeune père de famille le symbole d’une crise profonde que traverse la Tunisie. La police a usé de gaz lacrymogènes et a procédé à une vingtaine d’interpellations, se préparant à de nouvelles échauffourées nocturnes.
Plus de 200 morts
Elément déclencheur de la révolution de 2011, l’immolation constitue le moyen ultime pour se faire entendre. Aussi depuis huit ans, plus de 200 personnes sont mortes après s’être imbibées d’essence. Cette année, plusieurs femmes dans des gouvernorats éloignés de Tunis se sont suicidées de la sorte afin d’attirer l’attention sur leurs situations d’extrême pauvreté. Certaines sont passées à l’acte devant la recette des finances ou le gouvernorat de leur localité.
Au cœur de l’été, c’est un médecin militaire de Sousse qui a mis fin à ses jours, sur fond de problèmes familiaux. En juin, un jeune militaire, à Kairouan pour des motifs personnels. Début décembre, c’est à Sidi Bouzid, épicentre des évènements qui ont mené aux printemps arabes, qu’un jeune marié s’est immolé par le feu, pour dénoncer la situation économique et sociale de sa région.
Considérés comme un geste de désespoir ultime, dernière arme pour se faire entendre, ces suicides par le feu ne font plus la une des médias depuis longtemps en Tunisie. Ils sont considérés comme le râle des sans-voix qui se disent oubliées.