Le ministère des Pêches et de l’économie maritime du Sénégal a publié un communiqué de presse le 12 octobre 2020 en rejetant les principales conclusions du récent rapport de Greenpeace Afrique intitulé « Mal de mer : pendant que l’Afrique de l’Ouest est confinée par la COVID-19, ses eaux restent ouvertes au pillage ».
Selon le communiqué de presse du ministère « les allégations totalement infondées contenues dans ledit rapport sont d’autant plus surprenantes, qu’à plusieurs reprises, (…) le ministère des Pêches et de l’économie maritime a toujours apporté des éclairages, des précisions et des démentis, à chaque fois que cela s’imposait, à l’endroit des acteurs, de l’opinion publique nationale et internationale ».
En réponse aux accusations contenues dans le communiqué de presse du ministère, Dr Ibrahima Cissé, responsable de la campagne océans de Greenpeace Afrique, déclare que : « le ministère en charge de la pêche n’a apporté aucun élément de réponse à la polémique en cours. Greenpeace Afrique avait déjà officiellement saisi le ministère des pêches et de l’économie maritime au sujet de ces navires étrangers à deux reprises depuis le début de l’année 2020. Mais le ministère n’a pas jugé nécessaire de répondre à nos sollicitations.
« Au lieu de rejeter la faute sur la société civile, les autorités gouvernementales devraient choisir la transparence et rendre publique la liste des navires autorisés à pêcher dans la zone économique exclusive (ZEE) sénégalaise, y compris le type et la date d’attribution des licences pour lever toute équivoque. Mieux, le ministère devrait éclairer l’opinion publique en précisant à l’issue de quelles réunions de la Commission Consultative d’Attribution des Licences de Pêches industrielle (CCALP) les demandes de ces bateaux, objet de la polémique, ont été examinées et les acteurs présents.»
En 2012, rappelle M. Cissé, Macky Sall, candidat aux élections présidentielles, a soutenu la campagne de Greenpeace Afrique contre les bateaux de pêche étrangers qui exploitent les stocks marins sénégalais. Une fois élu, il a tenu sa promesse d’arrêter ce bradage ; ce qui lui a même valu le prix « Excellence in National Stewardship of the Ocean » lors de la sixième édition des Peter Benchley Ocean Awards, pour sa politique de protection de la pêche sénégalaise.
Greenpeace Afrique avait félicité le président Sall en l’exhortant à maintenir le gel des licences jusqu’à ce que des études scientifiques prouvent que les stocks de poissons dans les eaux sénégalaises se sont reconstitués. Selon le communiqué de presse du ministère, Greenpeace collabore avec les organisations de pêche industrielle et artisanale.
Dr Cissé répond que : « Greenpeace Afrique n’a cessé de dénoncer la monopolisation des ressources pélagiques et la fraude au tonnage par la pêche industrielle. Mais les autorités n’ont pas encore réagi à ce jour. En 2017, une expédition organisée par Greenpeace en collaboration avec les Etats membres de la Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) avait identifié de nombreux navires pratiquant la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), et des sanctions ont été prises à l’encontre de certains de ces bateaux.
Contrairement à ce que prétend le ministère, les usines de farine de poisson en réalité utilisent le poisson frais qui est sciemment laissé en état de putréfaction, car leur capacité dépasse largement les tonnages des déchets produits ».
Dr Cissé ajoute : « Trouver des failles dans le système juridique pour accorder des licences aux navires lorsque les stocks sont surexploités et que les populations sont sous-alimentées est contraire à l’éthique. Greenpeace reste et demeurera toujours du côté de la vérité et de la transparence – peu importe le statut de son vis-à-vis ».
Greenpeace Afrique réitère son engagement à soutenir les femmes transformatrices de poisson, les pêcheurs artisanaux et les communautés affectées par ce pillage des ressources halieutiques et lance un nouvel appel pour : la publication de la liste des navires de pêche industrielle du Sénégal, ainsi que le type et la date de délivrance des licences ; l’élimination dans la pratique de toute production de farine de poisson à partir de poisson frais, la réorientation de la capacité de transformation de la farine et de l’huile de poisson vers des produits destinés à la consommation humaine directe et la reconnaissance professionnelle des femmes transformatrices de poissons et leur accompagnement pour qu’elles jouissent de leurs droits